Au Burkina Faso, la décision récente de prolonger le régime de transition militaire pour une période additionnelle de cinq ans a suscité une vague de questionnements tant au niveau national qu’international. Face à un contexte sécuritaire précaire et des défis socio-économiques persistants, les autorités militaires justifient cette extension comme une nécessité pour stabiliser le pays et préparer le terrain à des élections démocratiques fiables. Cet article aspire à démêler les raisons profondes et les implications de cette prolongation, en explorant les enjeux politiques, sécuritaires et sociaux qui façonnent actuellement le paysage burkinabé.
Contexte Politique et Insécurité Croissante
Le Burkina Faso se trouve dans une période de grande instabilité politique et sécuritaire. Les coups d’État de 2022, notamment celui qui a porté le Capitaine Ibrahim Traoré au pouvoir, révèlent une profonde crise de gouvernance exacerbée par l’intensification des violences jihadistes. Ces conditions ont rendu le processus électoral très incertain, amenant à une décision de prolongation du règne militaire dans un effort de stabilisation.
Cette décision de transition longue de 60 mois, fixée à débuter en juillet 2024, a été justifiée par le comité d’organisation des assises nationales. Le Colonel Moussa Diallo, à la tête de ce comité, a mis en avant le contexte d’insécurité générale qui handicape la tenue d’élections sécurisées.
Suppression des Quotas et Priorité au Patriotisme
Dans la nouvelle charte signée, l’élimination des quotas attribués aux partis politiques a été une décision majeure. Le Capitaine Traoré a mis en avant le « patriotisme » comme critère principal pour participer à l’Assemblée législative de transition et au gouvernement. Cette démarche vise à reformuler la base de la participation politique dans le pays, écartant ainsi l’influence traditionnelle des partis politiques et consolidant le pouvoir des militaires qui prônent une approche basée sur l’unité nationale et la défense des intérêts du Burkina Faso.
Relations Internationales et Repositionnement Stratégique
Depuis le coup d’État de septembre 2022, le Burkina Faso a considérablement modifié sa politique étrangère. L’éloignement de la France, l’expulsion des diplomates et la suspension des médias français ont marqué un pivot vers de nouveaux partenariats internationaux. Ouagadougou s’est rapproché de pays comme la Russie, l’Iran et la Turquie, ainsi que de ses voisins Niger et Mali, tous deux dirigés par des régimes militaires confrontés à des problèmes similaires de violence jihadiste.
Un Régime Confronté à des Défis Humanitaires
Le Burkina Faso fait face à des défis humanitaires énormes, exacerbés par près de dix ans d’attaques attribuées à des groupes affiliés à Al-Qaïda et à l’État Islamique. Ces assauts ont provoqué le décès de plus de 20 000 personnes et laissé environ deux millions de déplacés. Dans ce contexte, la décision de prolonger le régime de transition semble aussi être une tentative de mieux préparer le pays à répondre efficacement à ces crises majeures et d’assurer un environnement plus sécurisé pour l’avenir.
En conclusion, la prolongation du régime de transition militaire au Burkina Faso est une réponse complexe à un ensemble de défis interconnectés, qui couvrent la sécurité, la politique et les relations internationales. La communauté internationale, tout comme les citoyens burkinabés, continuera de surveiller de près les développements dans ce pays du Sahel.
Source: www.lemonde.fr